Aujourd’hui nous sommes de plus en plus nombreux à chercher à changer nos comportements énergétiques. Repenser nos mobilités fait partie de nos désirs d’une ville « plus douce », et nous cherchons à imaginer des modes de déplacements durables. Mais de quoi rêve-t-on au juste ?
Un mode de déplacement durable est celui qui répond au besoin du plus grand nombre. Il doit être accessible à tous, facile d’utilisation, économique et efficient. Le mode de déplacement durable est donc un service, mais aussi probablement un bien commun dont chaque usager est en quelque sorte responsable. Le mode de déplacement durable est-il unique ? Peut-il être gratuit ?
Nous voyons se développer une offre de déplacements « libre service » dans un grand nombre de nos villes, vélib’ vélov’ vélocité pour les deux roues, mais aussi les voitures en libre service, les pédibus, le taxi à la demande etc… Les expérimentations sont multiples et variées. Mais est-ce bien celles qui sont durables qui remportent l’adhésion du plus grand nombre ?
Je propose de m’attarder sur deux exemples de services. L’un que je connais pour le pratiquer : l’autopartage. L’autre pour le voir fleurir dans un grand nombre de nos villes : le vélib. Tous deux sont des services de mobilité en libre service. Mais attardons nous un peu sur leur fonctionnement, le besoin auquel ils répondent… et leur durabilité.
L’autopartage est la mise en commun d’une flotte de véhicule entre utilisateurs qui font le choix de se constituer en coopérative. Les coûts d’achat, d’entretien, d’assurance etc sont mutualisés. Chaque membre de la coopérative a accès à l’ensemble des véhicules de la flotte ainsi mise en commun. Pour que le système soit efficient, il faut une flotte diversifiée et équitablement répartie sur le territoire. Il faut une flotte facilement accessible par des modes de déplacements doux ou collectifs, puisque le principe de l’autopartage est de n’utiliser la voiture plus que pour les déplacements où l’usager ne peut faire autrement. Par exemple, j’habite une ville au sud de mon département. Je dois me rendre dans une commune au nord du département, sitée à 150 km . Cette commune est non ou mal desservie par les transports collectifs. Utilisatrice d’un service d’autopartage, je vais utiliser le réseau des TER (trains express régionaux) pour aller jusqu’à la ville située au nord du département et bien desservie en transports. J’aurai déjà parcouru 120 km . Les 30 km restant je les ferai avec l’une des voitures de la flotte d’autopartage. Dernière chose importante, l’utilisation du service me sera facturée au réel du temps d’utilisation et des kilomètres parcourus. Je suis également responsable du bon usage du véhicule. C’est à moi de veiller qu’il reste suffisamment de carburant pour le prochain utilisateur et je dois ramener le véhicule à la station où je l’ai emprunté. Ce service a démontré son intérêt. Il a également démontré son impact sur le changement des comportements des usagers pour leurs déplacements quotidiens. Pour autant, aujourd’hui il est contesté par certains utilisateurs qui voudraient y calquer le modèle du vélib.
Qu’est-ce que le vélib ? Le vélib est un service de vélos en libre service financé par la publicité et les collectivités publiques. L’usager est libre d’emprunter un vélo dans n’importe quelle station et de le reposer là où ça l’arrange. Avant de se demander si un tel service est durable, demandons nous s’il est équitable. Imaginons que je sois utilisatrice d’un service Vélib et que j’habite sur les hauteurs de Montmartre ou des collines de Fourvière. Le matin pour aller travailler je gagne un temps fou à dévaler les pentes en vélo. J’abandonne mon vélo en bas de la colline dans une station vélib. La première ½ heure étant gratuite, je n’ai mis que 12 minutes à descendre, je ne serai pas facturée. Le soir intuitivement j’utilise le bus pour remonter la pente. Je mets peut être 19 minutes, ça me coûte peut être 1,40 €… mais c’est toujours mieux que 40 minutes à transpirer sur mon vélo. Si on s’en arrête là, on comprend vite que ce service n’est pas équitable vis-à-vis de ceux qui habitent aussi en haut de la colline mais sont ce jour là en congé et n’avaient par exemple besoin de descendre en ville qu’à 13h. A cette heure là il n’y a en théorie plus de vélo en haut de la colline, puisque les usagers préfèrent à juste titre utiliser le service de bus pour remonter ! Et maintenant, est-il durable ? A Paris pour garantir le bon équilibre des vélos entre les différentes stations, ce sont plus de 50 camionnettes qui circulent en permanence… Qui aurait envie de voir circuler en permanence des dizaines de camions dans nos centres villes pour rééquilibrer des stations de voiture libre service? Et pourtant, vu le succès du vélib, aujourd’hui certains réfléchissent à mettre en place un tel service de voiture en ville. Encore plus préoccupante que les questions de savoir si un tel service serait durable ou équitable, je m’inquiète de voir qu’il irait à l’encontre de la réduction significative de l’usage de la voiture en ville. En effet, la quasi gratuité et absence de contraintes liées à l’utilisation des vélib à vu exploser les cyclistes dans nos villes et c’est au moins une bonne nouvelle. Mais développer le même service avec des voitures ne conduirait certainement pas les usagers à remettre en cause l’usage de la voiture en ville. Le seul moyen de faire changer les comportements sur ce point est de proposer un service contraignant et dont le coût est assumé par l’usager.
Si vous êtes utilisateurs de services de déplacements qui proposent une alternative à la voiture individuelle, je suis preneuse de vos expériences !
Bonne soirée aux lecteurs !
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