samedi 4 décembre 2010

Européens, Américains, n'éteignez pas vos lampes ...

  
Alors que nous sommes sur la côte désertique de Paracas où, en 1821, Simon Bolivar débarque et gagne l’indépendance du Pérou ; nous apprenons qu’il se passe en France des choses inacceptables. Les Roms et les gens du voyage sont … une fois encore … discriminés. Je me suis déjà exprimée sur ce sujet « Roms Gens du voyage, amalgame ou pas ? » sur ce blog.

Je pense qu’il ne faut pas avoir honte… mais inlassablement chercher à comprendre les mécanismes qui conduisent à la peur… et inlassablement résister contre ces mécanismes. Dans le désert de Paracas, alors que de tristes souvenirs européens resurgissaient, j’ai pensé à ce magnifique texte que Pablo NERUDA a écrit en 1943 de retour d’un voyage au Pérou. Ce texte il l’a intitulé « Amérique, n’éteins pas tes lampes ».

J’aimerai tant écrire un texte si fort et si puissant à ma chère vieille Europe… Chère vieille Europe, n’éteins pas tes lampes … !!!

Extraits choisis de « né pour naître » - Pablo NERUDA aux éditions Gallimard.

« Votre patrie a toujours existé pour moi, mais non à la manière des autres territoires où l’homme vit, rêve, souffre, triomphe et chante. Je vois dans le Pérou l’utérus de l’Amérique, une enceinte entourée de hautes pierres mystérieuses, de morsures d’écume singulière, de fleuves et de métaux aux lits profonds. Les incas n’ont pas déposé dans les mains stupéfaites de l’Histoire une petite couronne de feu et de martyre mais une vaste, très vaste ambiance ciselée par les doigts les plus fins, par des mains capables d’acheminer les sons vers la mélancolie et le respect, et d’ériger des pierres gigantesques face au temps infini. […] Votre terre péruvienne a quelque chose de cosmique, quelque chose de puissant et de lumineux, qu’aucune mode, ni aucun style n’ont pu recouvrir, comme si sous votre territoire un immense gisant, minéral et phosphorique, monolithique et organique, était encore occulté par des toiles et des sanctuaires, des époques et des sables, et montrait sa vigoureuse structure dans les hautes pierres abandonnées et dans le sol inhabité que nous avons le devoir de découvrir. L’Amérique c’est votre Pérou, votre patrie mystérieuse, arrogante et ancestrale ; dans aucun de nos Etats nous ne trouverions les concrétions américaines qui, comme l’or et le maïs, se déversent dans votre coupe pour nous donner de notre Continent une perspective insondable. Américains du Pérou, si mes mains ont palpé votre écorce et si j’ai écalé le fruit sacré de votre fraternité, n’allez pas croire que je vous quitte en tenant mon cœur à l’écart de votre réalité et de votre grandeur présentes. Permettez-moi, en tant qu’Américain responsable, de plonger les doigts dans votre silence. Depuis des années, de toute l’Amérique silencieuse, deux pays vous observent. Ces deux pays sont les tours de guet et le levain de la liberté et s’appellent le Chili et le Mexique. La géographie les a placé  aux deux extrémités du continent. Il revient au Mexique d’être le rempart de notre sang lorsque la vie de l’Amérique exigea hardiment de lui qu’il imposât, face aux grands pays matérialistes du nord, nos matières fondamentales. Il lui revient aussi de brandir les premiers drapeaux quand la liberté menacée sur l’ensemble de la planète se voyait défendue par la haute caste des Américains du Nord. Le Chili a connu la liberté, comme l’avait prédit Simon Bolivar. Dans le sacrifice des terres les plus inclémentes, dans l’évaluation des obstacles les plus inextricables, ma patrie, avec les mains ardentes et délicates qui endurèrent les besognes et les climats les plus cruels de nos latitudes, put toucher le cœur de l’homme, le lever comme une coupe radieuse vers la liberté. L’histoire de mon pays a cheminé d’un pas lourd et dur vers l’aurore et nous nous sommes engagés, nous, les Chiliens d’aujourd’hui, dans la tache de dissiper quotidiennement les ténèbres qui nous échurent. »

Chère vieille Europe, n’éteins pas tes lampes… L'histoire de notre continent a cheminé d'un pas lourd et dur vers l'aurore et nous nous sommes engagés, nous, les européens d’aujourd’hui, dans la tache de dissiper quotidiennement les ténèbres qui nous échurent … inlassablement chercher à comprendre les mécanismes qui conduisent à la peur… et inlassablement résister contre ces mécanismes... inlassablement construire l'amitié entre les peuples... inlassablement ... garder des forces et surtout ne jamais lâcher prise... inlassablement aimer son pays... inlassablement aimer son voisin... inlassablement vivre sa liberté... inlassablement ... passionnément... pour que jamais la folie ne nous emporte...

5 commentaires:

Moukmouk a dit…

Cette histoire des Roms, me fait penser qu'ils ont été eux-aussi, avec les homosexuels et les juifs exterminés dans les fours crématoires.

pourquoi on se souvient de certains crimes et moins de d'autres ? je ne sais pas. L'histoire de l'Europe n'est qu'une longue suite de massacres...

je pense que les humains sont de moins en moins violents, mais quel chemin il reste à parcourir pour atteindre la paix.

Mélanie a dit…

Les Roms, mais aussi les manouches, les sinte, les gipsy, les gitans, les yenniches... tous les peuples nomades d'europe. En France les tsiganes n'ont été libérés des camps qu'en juin 1946, soit un an après la Paix. Le carnet anthropométrique est resté en vigueur jusqu'en 1969 ...

Oui, il faut inlassablement suivre la route qui nous conduira vers la paix...

Tili a dit…

C'est là qu'on va tester si l'Europe est vraiment un part feu social ou non...
Jusqu'ici je doutes...

Mélanie a dit…

Il reste du chemin à faire... en effet ! Et les solutions ne vont pas être simple à trouver...

Sisyphe a dit…

Eh oui, en Europe aussi, pour ce qu’il en est de la solidarité, ce n’est pas toujours ... le Pérou ...